L’expropriation pour cause d’utilité publique

L’expropriation est une procédure exceptionnelle qui permet à une personne publique de contraindre un propriétaire à céder son bien immobilier. Évidemment, l’exproprié a le droit à une indemnité.

En droit, une personne publique est une personne morale de droit public. C’est à dire dépositaire d’une autorité de l’État.

L’expropriation est gérée par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

Qui peut réaliser une expropriation ?

Les dépositaires de l’autorité de publique :

  • L’État,
  • Les collectivités territoriales
  • Les établissements publics fonciers ou d’aménagement
  • Les organismes HLM
  • Un organisme ou un concessionnaire d’une opération d’aménagement mentionné à l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme

Quels immeubles peuvent être concernés par l’expropriation ?

Les articles L. 511-2 à L. 511-9, définissent que l’expropriation peut concerner :

  • Des immeubles déclarés insalubres à titre irrémédiable en application de l’article L. 1331-28 du code de la santé publique ;
  • Des immeubles à usage total ou partiel d’habitation, ayant fait l’objet d’un arrêté de péril pris en application de l’article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation et assorti d’une ordonnance de démolition ou d’interdiction définitive d’habiter;
  • Exceptionnellement, des immeubles qui ne sont ni insalubres, ni impropres à l’habitation sont expropriables. Cela arrive lorsque leur expropriation est indispensable à la démolition d’immeubles insalubres ou d’immeubles menaçant ruine. Il peut en aller de même pour des terrains dont l’acquisition est nécessaire à la résorption de l’habitat insalubre. Même s’ils ne contiennent aucun bâtiment insalubre ou menaçant ruine.

Bien souvent, les questions de l’insalubrité et de l’arrêté de péril sont des conséquences de l’absence d’entretien des copropriétés.
Lire à ce propos nos articles sur :

L’expropriation est une procédure de dernier recours.

L’expropriation ne peut par conséquent intervenir que si elle présente une utilité publique.
Les juges valident donc l’utilité publique à trois conditions :

  • le projet se justifie réellement,
  • le projet est inévitable. Cela signifie par conséquent que recours à l’expropriation n’intervient qu’à l’épuisement de toutes les autres solutions. Les autres solutions sont l’acquisition amiable ou le droit de préemption,
  • Il ne doit pas y avoir disproportion entre l’atteinte à la propriété de la personne expropriée et l’objectif poursuivi.

Comment se passe une expropriation ?

Pour pouvoir recourir à l’expropriation, la personne publique doit respecter une procédure particulière qui se déroule en deux temps :

  • une première phase administrative préparatoire. Au cours de cette phase, la personne publique doit démontrer l’utilité du projet,
  • puis une deuxième phase judiciaire. Celle-ci sert à garantir le transfert de propriété ainsi que le paiement de l’indemnité à la personne expropriée.

Il peut se passer un temps variable de quelques mois à plusieurs années entre la décision de lancer une procédure d’expropriation et le transfert de propriété.

1ère étape : la phase administrative

La phase administrative se déroule en 2 temps :

  • D’abord une phase d’enquête publique destinée à informer le public,
  • Ensuite, une phase d’enquête parcellaire. Cette seconde phase doit identifier les propriétaires concernés et leur permettre de savoir avec exactitude dans quelle mesure cela concerne leurs biens.

Ces enquêtes durent au minimum 15 jours calendaires chacune.

L’enquête publique

La personne publique transmet un dossier au préfet. Celui-ci fonde l’enquête publique sur ce dossier. Il doit donc obligatoirement comprendre des éléments d’information susceptibles d’éclairer le public parmi lesquels :

  • une notice explicative du projet,
  • un plan de situation,
  • le périmètre délimitant les biens à exproprier et l’estimation sommaire des acquisitions à réaliser.

Une fois la transmission de ce dossier, le préfet prend un arrêté par lequel il ouvre l’enquête publique.
L’enquête est conduite par un commissaire-enquêteur désigné par le président du tribunal administratif. Elle est mentionnée dans les journaux locaux et fait l’objet d’un affichage en mairie où le projet doit avoir lieu.

Prononcé de l’acte déclarant l’utilité publique

Si l’utilité publique du projet est effectivement caractérisée, le Préfet prononce alors une déclaration d’utilité publique,
Cet acte doit être affiché à la mairie concernée par le projet. Car, le jour de l’affichage sert de point de départ aux intéressés pour contester la DUP et engager un recours devant le tribunal administratif.

L’enquête parcellaire

L’enquête parcellaire est fondée sur un dossier transmis par la personne publique au préfet dans lequel figure un plan précis des parcelles à exproprier.
Après la transmission de ce dossier, le préfet prend un arrêté par lequel il ouvre l’enquête parcellaire.
La personne publique doit informer personnellement le propriétaire du bien de l’ouverture de cette enquête par lettre recommandée avec accusé de réception.

Prise d’un arrêté de cessibilité

Le préfet peut déclarer cessible les parcelles en prenant un arrêté de cessibilité au vue des résultats de l’enquête
L’arrêté est publié au recueil départemental des actes administratifs et notifié au propriétaire du bien par lettre recommandée avec accusé de réception.

2ème étape de la procédure : la phase judiciaire

Le projet d’expropriation a été déclaré d’utilité publique. L’arrêté de cessibilité a été notifié aux propriétaires. Le transfert de propriété peut avoir lieu.

Le transfert de propriété

Il peut se faire par accord amiable entre la personne publique et la personne expropriée.
À défaut, la personne publique peut saisir le juge de l’expropriation du TGI pour qu’il prononce une ordonnance d’expropriation.
La personne publique doit notifier l’ordonnance d’expropriation au propriétaire du bien. Cela veut dire par recommandé avec accusé de réception. Cette notification a pour effet de transférer juridiquement la propriété du bien et les droits réels immobiliers à la personne publique.

À ce stade, l’exproprié ne peut donc plus vendre, ni faire de donation, ni constituer d’hypothèque sur le bien. Les baux cessent également de plein droit (le locataire verse désormais une indemnité d’occupation à l’exproprié jusqu’à son départ effectif)

L’exproprié conserve la jouissance du bien tant qu’il n’a pas reçu l’indemnisation.

L’offre d’indemnisation

La personne publique doit proposer une offre d’indemnisation à l’exproprié, par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte d’huissier.

À partir de la réception de ce courrier, l’exproprié dispose d’un délai d’1 mois pour faire connaître, par lettre recommandée avec avis de réception :
son acceptation,
ou le montant détaillé de sa demande.

Dès l’arrêté de cessibilité, l’exproprié peut également mettre en demeure l’expropriant de lui adresser une offre d’indemnisation.
À défaut de réponse dans le délai d’un mois, il peut saisir le juge de l’expropriation du TGI.
Si les deux parties ne trouvent aucun accord amiable, alors elles peuvent l’une ou l’autre, saisir le juge de l’expropriation. Celui-ci fixera l’indemnité qui par conséquent s’imposera aux deux parties.

NB : La personne publique doit faire une proposition d’indemnisation et une proposition de relogement au locataire. La personne publique doit faire cette proposition au moins 6 mois avant la date théorique d’expulsion.

Nature de l’indemnisation

L’indemnité doit couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation. L’autorité publique ou le juge l’apprécie en tenant compte du caractère impropre à l’habitation des locaux et installations expropriés.

La personne publique dispose d’1 mois après le paiement des indemnités dues à l’exproprié pour prendre effectivement possession du bien. Passé ce délai, l’autorité publique peut demander l’expulsion des occupants.

A noter que selon l’Art. L. 511-9., le refus par les occupants autorise l’autorité publique à demander l’expulsion sans indemnité. Cela est valable si les locaux ou installations qui font l’objet de la décision prévue à l’article L. 511-2, dans les conditions prévues à l’article L. 314-2 du code de l’urbanisme.

2 responses to “L’expropriation pour cause d’utilité publique

  1. zoom says:

    cet article serait tres interessant si il prenait en compte des exemples courants d ‘expropriations , comme les terrains pr ZAC lotissements , l expropriant proposant aux expropriés un prix souvent tres faible pretextant qu il va devoir viabiliser la zac et essaiera d acheter au plus bas prix des parcelles devant le juge de l expropriation qui devra faire la part du juste prix d indemnisation il faudra fournir des preuves comparatives de biens identiques vendus dans la meme zone pas dans le meme projet qui souvent sont acheté par le meme expropriant qui aura fait lui meme son prix ! et avancera comme preuve ses propres achats , des preuves de ventes ” neutres “” sur d autres ventes et projets seraient plus neutres et réalistes !

    1. CoproConseils says:

      Voilà, maintenant l’article est “très intéressant” !;-)
      Il ne vous aura certainement pas échappé que nous avons pour objectif d’informer les internautes sur les lois et la défense de leurs droits. Nous n’avons pas ni pour ambition d’être exhaustifs, ni de prendre parti. Nous avons dans cet article tenté d’expliquer les différentes étapes de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Bien conscients qu’il y aurait des dizaines d’articles à faire sur l’expropriation, mais qui ne sont pas du ressort de CoproConseils.
      Cordialement

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