Copropriétaire qui ne paie pas ses charges, que faire ?

Les impayés de charges en copropriété sont un problème récurrent dont il est vital de se débarrasser.
Les procédures en recouvrement de charges représentent 70% du contentieux en copropriété.
Une grande partie des copropriétés adhérentes chez CoproConseils ont un (ou plusieurs) copropriétaire qui ne paie pas ses charges.

Bien souvent les copropriétaires mauvais payeurs ne sont pas de mauvaise foi. Beaucoup d’entre eux pensent ainsi pouvoir faire pression sur le syndic et marquer leur mécontentement. Il n’en est rien !

Contre les impayés de charges, c’est à votre syndic d’agir.

Votre syndic doit agir et mener les démarches visant au recouvrement des charges. C’est une tâche qui lui est dévolue par l’article 18 de la loi de 65. La loi ne lui reconnait d’ailleurs pas le droit d’externaliser cette mission. Le syndic engage sa responsabilité si sa négligence cause un préjudice à la copropriété. Les impayés de charges en copropriété sont donc à la fois un problème pour la copro, mais également pour le syndic.

Indispensable mais pas suffisant

Ce principe posé, il faut être objectif ; mais il est important de ne pas se reposer entièrement sur sa gestion. Il n’a pas que votre copropriété à l’esprit, les mois passent vite et les dettes se creusent. Il est essentiel que le conseil syndical suive de près le syndic dans ses démarches pour recouvrer les charges impayées par les copropriétaires indélicats.

CoproConseils peut vous aider à vous y retrouver dans le dédale juridique de vos droits et obligations et vous conseiller sur la meilleure stratégie à adopter en fonction de la situation de votre copropriété.

Cet article vise dans un premier temps à vous informer sur les différentes étapes qui doivent ou peuvent se succéder lorsqu’un ou plusieurs copropriétaires sont défaillants. Attention tout cela ne s’applique que sur des charges exigibles !

Charges exigibles

D’une manière générale, les charges ne sont exigibles que lorsqu’elles ont fait l’objet d’une validation par l’assemblée générale. Dès lors que l’assemblée générale vote le budget, les appels de fonds sont exigibles. Le reliquat est exigible dès lors que l’assemblée générale a approuvé les comptes. Le reliquat de charges, c’est la différence entre le budget prévisionnel et les charges réelles. Il en va de même pour les travaux, même s’ils sont exceptionnels et revêtent un caractère d’urgence ; les appels de fonds correspondants ne sont exigibles qu’à partir du moment où une assemblée générale (extraordinaire si besoin) les a validés.

En matière de recouvrement de charges, devant un tribunal c’est à la copropriété d’apporter la preuve de la créance. Pour cela il faut a minima produire le décompte de répartition des charges du copropriétaire impliqué, les documents comptables de la copropriété (grand livre et annexes) et le procès-verbal d’approbation des comptes de l’exercice en question. Ce sont des préalables sans lesquels la copropriété ne peut aller devant un tribunal.

Toutes les étapes du recouvrement de charges ci-après détaillées ne sont pas toutes obligatoires. Certaines peuvent être interchangées. Certaines sont plus adaptées à une situation et sont inutiles dans une autre. Notez également qu’elles se succèdent à partir du moment où la créance reste impayée. Dès lors que le débiteur se rapproche du syndic et négocie avec lui un protocole d’accord et un échéancier d’étalement de la dette, la procédure peut s’arrêter.

Première étape en cas d’impayé de charges : la relance.

Les délais d’exigibilité des charges sont dépassés. Le syndic relance le copropriétaire défaillant par lettre simple pour lui rappeler ses obligations. Cette lettre informe le copropriétaire défaillant du risque d’une procédure de recouvrement s’il ne paie pas.

Cette première étape n’est pas obligatoire. Votre syndic a le droit de passer directement à la deuxième étape.

Un syndic ne peut pas facturer une lettre de relance. Si elle l’est, c’est abusif, car cela fait partie des missions de gestion courante du syndic.
C’est souvent pour cette raison que les syndics passent directement à l’étape suivante.

Deuxième étape : la mise en demeure

Concrètement la mise en demeure est une relance envoyée en lettre recommandée avec accusé de réception. Elle peut porter différents titres mais à la différence de la relance, elle peut faire l’objet d’une facturation spécifique par le syndic. Il n’y a pas de tarif légal, il mentionné dans le contrat de syndic et peut être négocié au moment de la signature du contrat.

Le passage par la mise en demeure est obligatoire avant toute autre sorte de poursuite du débiteur.

Attention : La loi ne définit pas de délais légaux entre la date d’exigibilité des fonds, la date d’envoi d’une mise en demeure et la date de lancement d’une procédure. Les appels de fonds sont exigibles dès le premier jour du trimestre. Le syndic a le droit d’envoyer une mise en demeure (facturée) le lendemain et une sommation par voie d’huissier (également facturée) le surlendemain !
Il est donc important de payer ses charges, même si vous n’êtes pas d’accord avec ce qui a été voté en assemblée !

Super-procédure de recouvrement de charges ELAN

La mise en demeure est le point de départ de la “super procédure de recouvrement” lancée par la loi ELAN en 2018.
Pour l’instant il est encore trop tôt pour se prononcer sur son efficacité.

La loi ELAN modifie l’article 19-2 de la loi de 65. Cet article a été créé par la loi SRU de 2000.

Si 30 jours après la réception de la mise en demeure, le copropriétaire débiteur ne donne aucune réponse, alors l’intégralité des sommes présentes, passées et prévues sont dues. Le syndicat des copropriétaire par l’intermédiaire de son syndic peut saisir le Président du TGI dans une procédure accélérée dite “comme en matière de référé”. Cela s’appelle la déchéance du terme.

Concrètement cela signifie que la copropriété est fondée à réclamer à l’indélicat copropriétaire non seulement les charges qu’il doit, mais aussi celle qu’il va devoir puisque le budget a été voté.
La loi ELAN a élargi cette déchéance du terme à la fois au budget prévisionnel et au fond travaux.

Toutes les charges deviennent immédiatement exigibles !

Cela aurait pour avantage de limiter le nombre de procédures.
En effet une seule procédure permettrait de recouvrer à la fois les charges dues et celles à devoir !
Reste à savoir comment cette disposition va être utilisée par les syndics et surtout comment elle va être accueillie par les juges.
Super procédure à l’essai ! doit faire ses preuves !
En attendant, la procédure classique continue d’être applicable et appliquée.

Troisième étape : la sommation ou l’injonction de payer.

Cette troisième étape peut être faite par voie d’huissier (sommation ou injonction de payer) ou par voie d’avocat (mise en demeure ou lettre comminatoire). On est toujours dans le registre de la relance, mais cette fois par l’intermédiaire d’un représentant de la justice.

Cette étape n’est pas obligatoire. Mais les syndics l’utilisent souvent car elle est efficace. Recevoir une injonction de la part d’un huissier n’est pas anodin. Par ailleurs via cette solution le syndic transfère le dossier et facture la prestation !

Quatrième étape en cas d’impayés de charges : la saisie.

Le dossier est entre les mains de l’huissier, celui-ci peut convenir avec le syndic de la saisie la plus appropriée.

Une saisie sur loyers pour un propriétaire-bailleur défaillant. Éventuellement une saisie sur voiture pour un propriétaire de garage ou de parking qui ne paie pas ses charges. Ou bien une saisie sur salaires ou sur comptes bancaires. Il n’est pas besoin de jugement d’un tribunal pour ce faire, mais il n’est pas toujours possible de procéder à une saisie, certains mauvais payeurs savent s’organiser.

Cinquième étape : la procédure devant un tribunal

Le syndic saura s’adresser au tribunal compétent suivant les montants qui sont en jeu. La loi Macron du 6 août 2015 permet d’avoir recours sous certaines conditions à une procédure simplifiée de recouvrement des créances (voir plus loin la procédure simplifiée)

Le référé

La loi de 65 modifiée en 2000 donne la possibilité à la copropriété d’engager une procédure en référé à l’encontre du copropriétaire défaillant. Il s’agit d’une procédure judiciaire d’urgence, rapide et peu coûteuse. Il est possible de s’y rendre sans avocat (même s’il est tout de même fortement conseillé).

Le juge du fond

Porter l’affaire devant un juge de fond. Devant le tribunal d’instance si la dette est inférieure à 10 000€. Il s’agit donc d’un magistrat temporaire si la somme est inférieure à 4000 €. Ce sera un tribunal de grand instance si la dette est supérieure à 10 000 euros. Une fois le copropriétaire défaillant condamné, le syndic mandate un huissier de justice.

Éventuelle prise d’hypothèque

Une prise d’hypothèque peut éventuellement précéder l’action en justice. Il faut pour cela que la dette soit ancienne de plus de 4 ans et que les sommes soient importantes. Ceci permet à la copropriété d’être remboursée lors de la vente du bien du copropriétaire défaillant. Que la vente soit faite de son plein gré ou qu’elle soit ordonnée par un juge. (Pour les dettes de moins de 4 ans la copropriété est automatiquement parmi les créanciers remboursés par la loi de 1994).

Conséquences :

Lorsque le dossier arrive au Tribunal, la copropriété s’en remet à la décision du juge. C’est lui qui tranche et qui peut ordonner, si aucune autre solution n’est possible, la saisie immobilière du bien.

Il faut garder à l’esprit que durant toutes ces étapes le copropriétaire débiteur peut trouver un arrangement à l’amiable avec le syndic qui lui permettra d’arrêter toutes les poursuites et ce jusqu’au dernier moment. Le juge peut tout à fait proposer cet arrangement. La saisie du bien immobilier est la solution ultime. Le juge préférera toujours éviter la saisie pour peu que le débiteur fasse montre d’un minimum de bonne volonté.

Pour que l’appartement du débiteur soit mis en vente judiciaire il faut :

  • l’ordonnance de jugement c’est à dire la signification du jugement faite par voie d’huissier et
  • une autorisation de l’assemblée générale faite au syndic à procéder à cette vente.

Il n’est pas nécessaire d’attendre le jugement d’exécution qui condamne le débiteur. Le syndicat peut à tout moment autoriser le syndic à procéder à la vente aux enchères de l’appartement. Cela peut tout à fait être fait préventivement lors d’une assemblée générale ordinaire.

Vous pouvez demander à votre syndic que soit mis à l’ordre du jour de la prochaine AG une résolution concernant la saisie immobilière du lot. Attention cette résolution doit concerner l’autorisation du syndic de procéder à la vente aux enchères et le montant de la mise à prix en fonction des sommes estimées irrécouvrables.

Vous gagnerez ainsi du temps et de l’argent puisque dès que l’ordonnance d’exécution sera en sa possession, le syndic pourra agir sans avoir à convoquer une assemblée générale extraordinaire ou attendre la prochaine assemblée générale ordinaire.

Sixième étape : la vente aux enchères.

Un avocat mandaté par le syndic s’occupe de la vente aux enchères du bien immobilier du copropriétaire défaillant.

Ensuite, la copropriété est ce que l’on appelle un “créancier privilégié”. Elle n’a pas besoin de s’inscrire pour bénéficier des sommes issues de la vente judiciaire et qu’elle est prioritaire. Néanmoins, l’État passera toujours se servir avant ! Si votre copropriétaire mauvais payeur doit déjà de l’argent au fisc, la copropriété ne pourra se rembourser que sur les sommes restantes !

Il ne vous reste plus qu’à accueillir le nouveau copropriétaire. La copropriété peut repartir sur de nouvelles bases financières plus saines !

Étape intermédiaire optionnelle ; l’avance de solidarité

Quelques fois, les impayés de charges dans une copropriété atteignent de tels niveaux que la copropriété ne peut plus payer ses factures courantes : eau, électricité, salaires, honoraires du syndic …

Le syndic peut donc être amené à lancer un appel de fond de solidarité. Il s’agit de lancer un appel de fond supplémentaire pour éviter que la copropriété soit en cessation de paiement. Il doit impérativement proposer cela pour éviter l’administration judiciaire à la copropriété. C’est dans sa mission. Bien souvent les copropriétaires qui ont l’habitude de payer leurs charges considèrent que le syndic leur demande de payer pour les autres. Ce n’est pas tout à fait vrai. L’avance de solidarité n’est pas à fond perdu. Elle est remboursée aux copropriétaires dès que le débiteur a réglé ses dettes d’une manière ou d’une autre. (attention remboursée sous la forme d’un crédit de charges).

Cet appel de fond de solidarité est essentiel pour éviter l’administration judiciaire qui serait un coût inutile et disproportionné pour l’ensemble des copropriétaires. Mais il ne doit pas et surtout pas être ni la première, ni l’unique démarche réalisée par le syndic face à des impayés de charges.

Attention : l’appel de fond de solidarité ne peut pas être unilatéralement décidé par le syndic. Il doit faire l’objet d’un vote en AG.

Le rôle du conseil syndical

Face à un problème d’impayés, les copropriétaires doivent s’armer de patience et de persévérance. La situation ne se règle pas en quelques semaines. Mais les syndics laissent trop souvent passer les mois sans agir. C’est le travail du Conseil Syndical de le relancer.

A chaque étape il est important de relancer le syndic et de faire le point sur la situation. Le copropriétaire débiteur s’est engagé à régler ses charges et épurer ses dettes à hauteur d’un certain montant mensuel ? Renseignez-vous. N’attendez pas la prochaine assemblée générale pour vous rendre compte qu’en réalité il ne tient pas ses engagements.

Le syndic vous propose un appel de fond de solidarité pour éponger les dettes ? Très bien, mais assurez-vous qu’en parallèle il est bien en contact avec un huissier pour relancer le mauvais payeur et procéder à des saisies si cela est possible. Bref demandez lui régulièrement où en est le dossier.

Attention : en aucun cas le rôle du conseil syndical est d’agir directement auprès des copropriétaires débiteurs !

Mise à jour 2019 :

Le 27 juin 2019 est enfin paru un décret d’application d’une loi de 2010. Ce décret définit les modalités selon lesquelles les huissiers de justice peuvent avoir accès aux parties communes des copropriétés. Il établit que le syndic doit sous 5 jours ouvrables, rendre possible l’accès de la copropriété à un huissier de justice pour l’accomplissement de sa mission.

Mise à jour 2020 :

Attention le syndic doit utiliser pour le recouvrement des charges, des moyens proportionnés au montant des charges à recouvrer. Le comportement du débiteur ne peut suffire pour justifier d’utiliser des moyens disproportionnés. Décision de la cour de cassation du 10 septembre 2020.

Attention aux frais injustifiés !

A chaque étape de la procédure de recouvrement de charges, et à compter de la mise en demeure, le syndic peut percevoir des honoraires supplémentaires. Le recouvrement de charges donne doit à facturation hors contrat. Le tarif appliqué est prévu au contrat.
De plus, le législateur donne pas de limite. Il ne précise pas combien de mise en demeure un syndic a le droit de faire. Il ne précise pas non plus combien de fois maximum il a le droit de rencontrer l’avocat pour faire le point sur le dossier ce qui systématiquement donne droit à la facturation d’une vacation. etc.

La copropriété fait l’avance

Ces frais de recouvrement de charges sont à la charge du copropriétaire débiteur. C’est logique, puisque c’est sa faute si le syndic doit faire ce travail supplémentaire. Idem pour l’intervention d’un avocat ou d’un huissier. Mais cela ne veut pas dire que le syndic attend que ce propriétaire soit solvable ou ait réglé ses dettes d’une manière ou d’une autre pour se payer ou payer l’avocat.
Le syndic règle immédiatement ces factures, y compris la sienne. C’est la copropriété qui fait l’avance.
Ceci est tout à fait légal.

Les frais justifiés et les frais injustifiés

Une fois au tribunal, le juge va décider de quelles sommes le copropriétaire est redevable. Il va en même temps proposer un plan d’apurement de la dette. Le juge peut donc ne pas retenir toutes les sommes impayées comme dues.

Il peut mettre de côté certaines créances pour différentes raisons. Celle qui nous intéresse c’est “frais injustifiés”. En effet, si le syndic envoie de trop nombreuses mises en demeure avant de passer à l’étape suivante, ou bien facture un nombre d’heure de travail avec l’avocat sans commune mesure avec le dossier, le juge peut considérer que ces frais sont injustifiés.

Le rôle du conseil syndical

Le rôle du conseil syndical doit impérativement étudier l’ordonnance de jugement pour traquer les frais injustifiés. Si votre copropriété est adhérente CoproConseils se charge de cela lors de l’audit. Les frais considérés comme injustifiés par le juge, ne doivent en aucun cas être pris en charge par la copropriété. Il faut demander au syndic de les prendre à sa charge.

Frais justifiés

Il est tout à fait possible que des frais justifiés soient malgré tout écartés par un juge indulgent. Dans ce cas, l’ordonnance ne justifiera pas le refus par la mention “frais injustifiés”. Alors, ces frais seront effectivement à la charge de la copropriété.

Qu’est ce que la procédure simplifiée de recouvrement de charges ?

La loi du 6 août 2015 met en place d’une procédure simplifiée de recouvrement des créances. Pour des dettes d’un faible montant, elle permet d’obtenir l’acte exécutoire sans passer devant le juge. Cette procédure allégée permet de plus rapidement traiter les petites créances. Cela peut éviter que la copropriété ne s’enfonce dans les difficultés financières au fur et à mesure que les charges impayées s’accumulent durant une procédure classique qui peut durer des années.

Cette procédure simplifiée n’est pas très adaptée aux copropriétés.

En plus de limiter le montant maximum des créances à 4000 €, la loi prévoit également d’autres contraintes

Première contrainte :

Tous les frais de procédures sont à la charge exclusive du créancier, autrement dit de la copropriété ! Lorsque le coût d’un recouvrement peut représenter 15 ou 20% du montant de l’impayé, il convient d’y réfléchir à deux fois.

Deuxième contrainte :

L’huissier doit obtenir l’accord du débiteur, c’est à dire du copropriétaire défaillant.
Accord sur le montant de la créance et sur les modalités de remboursement.

Non contraignante

Autrement dit cette procédure simplifiée n’a aucun caractère contraignant. C’est certainement la principale pierre d’achoppement à la mise en œuvre de cette procédure simplifiée.

Cette procédure simplifiée vise plus à désengorger les tribunaux qu’à réellement donner un outil supplémentaire aux copropriétaires dans la lutte contre les impayés de charges. Rappelons que cette disposition n’a pas été conçue pour le monde de la copropriété, mais qu’elle s’y applique. Ce n’est néanmoins pas à totalement déconsidérer. Peut être qu’auprès de certains copropriétaires défaillants mais de bonne foi, l’intervention d’un huissier plutôt que du syndic peut être le déclic qui va les décider à régler leurs charges de copropriété …

Le syndic peut-il déléguer le recouvrement de charges impayées ?

Le recouvrement des charges est déjà une mission ingrate. Elle l’est encore plus lorsqu’il s’agit de recouvrement des impayés de charges !
Il est tentant pour un syndic de confier cette mission à des entreprises spécialisées dans le recouvrement des impayés qui démontrent déjà leur efficacité à la plupart des entreprises.

Transfert de responsabilités illégal

Le syndic n’a pas le droit de déléguer le recouvrement des impayés.
Même si un vote d’assemblée générale l’y autorise, cette décision sera caduque car un tel transfert de responsabilité n’est pas légal.

Le recouvrement de charges, tout comme la gestion des archives ou bien le compte bancaire séparé, font partie des missions courantes du syndic. Mais contrairement à la gestion des archives que le syndic a le droit d’externaliser, le recouvrement des charges et impayés de charges doit être réalisé par le syndic lui même.

Cas particulier des résidences-services

Les résidences services offrent en général à leurs résidents toutes sortes de prestations plus ou moins originales qui vont de l’entretien des espaces verts, à au gardiennage, en passant par la restauration, les services d’un minibus, d’aide à domicile ou des prestations d’animation, de coiffure, d’infirmière, de kinésithérapie etc…

Ces prestations peuvent ou non, être incluses dans les charges de copropriété.
Si elles sont incluses, le syndic doit assumer cette tâche de recouvrement des charges concernant ces prestations. Aucune délégation ne peut être accordée, même si ces services sont réalisées par un prestataire extérieur.
A l’inverse, si certaines prestations ne sont pas incluses dans les charges de copropriété, alors le syndic peut déléguer le recouvrement des impayés.

Face aux impayés de charges, quelle est la position des pouvoirs publics ?

Il y a “impayés de charges” lorsque un ou plusieurs copropriétaires n’honorent pas un ou plusieurs appels de fonds. Si ces copropriétaires sont nombreux, ou si la situation s’éternise, ou si la copropriété est petite, cette absence de fonds engendre des problèmes graves. Elle peut conduire la copropriété à ne pas réaliser les travaux nécessaires à son entretien et donc à se dégrader. Autre conséquence : ne plus pouvoir payer ses factures courantes. Viennent ensuite plus ou moins rapidement la faillite et l’administration judiciaire. Les suites dramatiques des copropriétés non entretenues, peuvent amener les pouvoirs publics à des options catégoriques.

Ainsi un problème a priori personnel est en réalité l’affaire de tous. En réalité c’est l’avenir de l’ensemble de la copropriété qui est engagé.
Lorsque cette situation se reproduit à l’échelle nationale dans de plus en plus de copropriétés, il est indispensable que les pouvoirs publics s’emparent du problèmes et tente d’y remédier.

Effectivement depuis plusieurs dizaines d’années, les gouvernements successifs tentent par différents moyens d’appréhender le problème et de proposer des solutions. Il semblerait que ce soit la prévention qui prédomine ces dernières années. En 2018, la loi ELAN donne néanmoins des moyens supplémentaires à la répression.

Les études

Une étude du Ministère de la Justice en 2017, montre que 70% du contentieux en copropriété en France porte sur les impayés de charges !
Soit presque 30 000 litiges par an ! La provence arrive en seconde position derrière la région parisienne. Triste palmarès.

L’adil 75, Agence Départementale d’Information sur le Logement a publié fin 2010 un rapport très intéressant sur les impayés en copropriété. Il est tiré d’une étude réalisée auprès de leurs adhérents dans le courant de l’année 2010. Certes, ce rapport ne porte que sur des logements parisiens. Par de nombreux aspects n’est pas transposable aux Bouches du Rhône. Il reste extrêmement intéressant .

La responsabilité des syndics est importante. Tout d’abord parce que ce sont eux qui de part la loi sont responsables du recouvrement des charges. Or le recouvrement de charges est une partie peu rémunératrice de leur travail. Elle n’est donc pas prioritaire. C’est pourtant l’inverse qu’il faudrait faire. Plus la question des impayés est prise tôt, plus on a de chances de régler le problème.

Un syndic peu actif n’est pas une fatalité. Le conseil syndical a aussi une responsabilité et une action possible, ne serait-ce qu’en relançant le syndic et en lui rappelant sa mission, mais également en lui demandant régulièrement une balance des paiements.

Au delà de la responsabilité de ces deux acteurs classiques de la copropriété, le rapport de l’ADIL met au jour deux éléments très intéressants qui permettent de comprendre le problème différemment.

L’imprévu souvent source première des difficultés financières

La mise en difficulté financière d’une copropriété suite à des impayés de charges intervient souvent dans les années qui suivent des travaux exceptionnels type réfection des ascenseurs ou ravalement de façades, voire suite à un dépassement de budget travaux. Les copropriétaires peuvent assurer les charges de gestion courante, mais ont du mal à financer les charges exceptionnelles. D’autant que malheureusement les copropriétaires à faibles revenus vivent justement dans des copropriétés où les travaux d’entretien ont souvent un caractère d’urgence.
L’ADIL conseille deux solutions ;

Mieux évaluer le montant exact des travaux

Mieux évaluer le montant exact des travaux signifie multiplier les devis de professionnels pour se faire une idée précise. Il ne faut pas se limiter à comparer la dernière ligne : le prix. Il faut accompagner l’entreprise lors de sa visite et ne pas hésiter à poser des questions à s’informer. Lorsque sur 5 devis, un seul propose un montant de 30% inférieur, il faut se demander pourquoi. Si ce prix attractif cache un dépassement annoncé, la copropriété est perdante.

Mieux budgétiser les travaux dans le temps

Bien budgétiser des travaux exceptionnels signifie adapter le paiement aux capacités financières de tous les copropriétaires. Souvent les propriétaires les plus en difficultés ne sont pas présents en assemblée. Ils ne sont pas là pour expliquer leur difficulté à financer des travaux exceptionnel. Pour ne pas mettre la copropriété elle même en difficulté, il faut néanmoins compter avec eux aussi. La clé du financement des dépenses exceptionnelle est dans l’étalement de celles-ci dans la durée. L’ADIL conseille de faire des provisions pour travaux, avant même que ceux-ci ne soient nécessaires ni votés. Ceci est d’autant plus souhaitable qu’il est possible pour les copropriétés de placer ces fonds sur un livret A.

L’ADIL conseillait en 2010 la mise en place d’un “fond de prévoyance”. Elle a été entendue quatre ans plus tard avec la mise en place du fonds ALUR rendu obligatoire par la loi du même nom.

Information et formation manquent cruellement.

L’autre élément mis en évidence par l’enquête de l’ADIL est assez édifiant ; une bonne partie des impayés de charges en copropriété viendrait d’une méconnaissance ou d’une incompréhension du mode de fonctionnement même de la copropriété. Un grand nombre de copropriétaires considère le non paiement de leurs charges comme un mode d’expression de leur mécontentement ou de leur désaccord. Vous pouvez à ce titre et par curiosité, consulter les commentaires postés par les internautes à la suite de notre article sur les mises en demeure, il confirme totalement ce constat de l’ADIL.

Une bonne partie également ne comprendrait tout simplement pas du tout à quoi correspondent les montants qu’on leur demande.

Formation et information sont des tâches ingrates et a priori non rémunératrices

Il y a donc d’importants progrès à faire dans le domaine de l’information et de la sensibilisation des copropriétaires. Le syndic et le conseil syndical qui sont en première ligne. C’est vrai, il est souvent difficile pour le conseil syndical d’expliquer qu’il est important de payer ses charges. Mais lorsque le contact est régulier, la sensibilisation à la comptabilité de la copropriété sera plus aisée.

Du point de vue du syndic, chaque minute passée à faire de la sensibilisation semble une minute non rentable. D’autant que pour les syndics qui manipulent ces chiffres au quotidien, la difficulté à comprendre les comptes n’est pas évidente. Pourtant c’est à long terme qu’on s’y retrouve.

Les aides financières

Pour finir, il est important d’évoquer les portes de sorties. En cas de réelles difficultés financières et de fort impayés de charges, il existe des aides, il existe des solutions.

Au niveau de la copropriété, le mandataire ad hoc est chargé d’éviter l’administration provisoire aux copropriétés en grande difficulté financière. Ce mandataire va chercher à trouver des solutions au cas par cas. En effet, les aides sont essentiellement individuelles. Très peu s’appliquent à la copropriété comme entité excepté certaines subventions de l’ANAH par exemple.

Au niveau individuel il existe toute une batterie d’aides. Elles sont nombreuses et proviennent de différents organismes. Ces aides sont toutes accordées sous conditions, de tous ordres et souvent drastiques :

  • conditions de ressources évidemment,
  • de localisation géographiques,
  • d’efficacité énergétique,
  • âge du bâti,
  • etc. etc.

C’est un tel casse-tête qu’au final. Ces aides qu’on juge toujours insuffisantes ne sont même pas utilisées à plein par ceux qui pourraient y avoir droit.

Là encore une question d’information, de sensibilisation.

193 commentaires au sujet de “Copropriétaire qui ne paie pas ses charges, que faire ?”

  1. Bonjour,
    Dans le cadre d’un syndic bénévole qui manifestement s’obstine à ne pas ouvrir de compte bancaire, j’ai décidé de suspendre le règlement de mes charges jusqu’à ouverture de ce dernier en me fondant sur le principe q’une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.En ais-je le droit ?
    Très bonne journée,
    Cordialement

    Répondre
    • Aucunement !
      Par contre, vous devez exiger l’ouverture d’un compte en banque séparé (mise en demeure) et si le syndic ne s’exécute pas, porter l’affaire devant le tribunal.
      Cordialement

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